NOVA-IMAGO-ZAP

Images politiques et nouveaux mondes à construire : la culture visuelle du voyage des zapatistes pour la vie en Europe 

Ce projet cherche à analyser l’émergence, dans le champ des études visuelles, de pratiques inédites de production d’images créées par les militants européens lors des rencontres avec les zapatistes, durant leur Voyage pour la vie (Mexique-Europe, 2021). Il étudiera leur rôle structurant dans les imaginaires communs et dans la conscience collective des luttes sociales liées aux urgences de l’Europe (écologie, féminicides, racisme, montée de l’extrême-droite). Il vise à en constituer une archive.

En 2021 a eu lieu en Europe le Voyage pour la vie, une initiative des zapatistes (Mexique), pour rencontrer les collectifs « d’en bas », qui luttent contre les lois écocides du marché, le sexisme et l’homophobie (voir «Déclaration pour la vie » qui a précédé leur venue (CETRI, 2021). 1400 collectifs se sont organisés pour les accueillir et échanger avec eux dans des activités, festives et politiques, via un intense travail de communication et d’échanges (réseaux sociaux, messagerie, plateformes audio-visuelles). En travaillant des mois durant à leur accueil, les collectifs ont relevé un défi : celui de l’activisme local, pensé et raconté au prisme de l’internationalisme. Leurs réponses, par les milliers de documents et objets produits (tracts, affiches, photographies, banderoles, films, communiqués de presse), les rencontres ainsi que les collaborations intenses et transnationales ont fabriqué un commun inédit qui reste encore à explorer. L’hypothèse est que si les zapatistes ont transformé les usages de l’image dans la gauche internationale, les collectifs européens ont fait montre d’une créativité inouïe dans la défense commune du vivant et contre le racisme, le sexisme et l’homophobie.

Les motivations qui sous-tendent les postulats du voyage pour la vie résonnent avec le renversement philosophique et anthropologique qui a eu lieu dans les dernières décennies du XXème siècle (Latour, 1991; Haraway, 1991) et les demandes des mouvements (éco)féministes et écologiques (Hache, 2016; Malm, 2021). En résonance avec les zapatistes et la pensée des communautés autochtones (indígenas, en espagnol), le renouvellement de la manière occidentale de percevoir le commun convoque la remise en question d’un postulat, hégémonique en économie, exclusivement anthropocentré. Les analyses d’Haraway postulent que la survie face à l’effondrement écologique de la terre passe non seulement par la communauté humaine mais aussi par la coopération inter-espèce et la mise en place d’un commun du vivant (2020). A ces formes, s’arriment des pratiques culturelles et visuelles spécifiques (Mirzoeff, 2020) déterminantes pour le partage et la construction du social.

C’est pourquoi ce projet cherche à interroger les images et les pratiques créatives mises en place lors du Voyage pour la vie, ainsi que leurs limites et défis.

Étudier comment les collectifs militants basés en Europe ont répondu et ont participé au voyage aussi par le biais de l’image nous permet de 1) penser ce voyage comme un temps de fabrication du commun, c’est-à-dire comme un mode de performativité collective où des espaces démocratiques,  horizontaux, répondant à un cadre d’autogestion précis se mettent en place (Dardot et Laval 2015; Federici 2017);  2) d’interroger le rôle des images dans la configuration de nouvelles pratiques et la prise de conscience collective (de genre, de classe, de race); 3) aborder le phénomène des mobilités de militant.es, pas exclusivement à travers le mouvement des activist.es, mais aussi par les transferts de motifs iconographiques, répétés ou en mutation.

Dans le contexte actuel de luttes contre la marchandisation des corps féminines et des territoires, et face à des processus d’extractivismes et de prédation des ressources, naturelles ou culturelles (Malm, 2016), l’élan avec lequel a été accueilli ce voyage mérite une réflexion sur les imaginaires qui régissent les rapports Sud/Nord. Dans une Europe où l’extrême-droite occupe une place dans l’agenda politique, quelles sont les marges d’action symbolique des militant.e.s dans la res publica ? Quelles images le militantisme européen d’aujourd’hui doit-il aux luttes des Suds? A l’occasion de ce voyage, quelle place a joué l’exotisation de l’autre ? Lors des rencontres a pu être imaginée l’émancipation, sans romantisme ?

Ces questions dessinent le cadre des objectifs concrets et divers de notre projet car l’étude est inédite : 1) établir un archive de la culture visuelle produite; 2) analyser les thématiques et matérialités des images, ainsi que leurs circulation et mobilités (en identifient les vecteurs de transferts), ainsi que leur réception et ré-semantisations dans des divers contextes militants par ou elles ont circulé; 3) étudier la représentations des femmes dans les images produites; 4)  décrire les efforts  de décloisonnement et de dénaturalisation du genre ; 5) étudier le rôle que les luttes pour la justice environnemental ont joué dans la culture visuelle du voyage.

ProjetDonnés techniquesMembres de NOVA-IMAGO-ZAP

Images politiques et nouveaux mondes à construire : la culture visuelle du voyage des zapatistes pour la vie en Europe / NOVA-IMAGO-ZAP

Référence: 
Concours: 
Organisme de financement: LABEX – Université Toulouse 2 Jean Jaurès
Centre d’exécution: Université Toulouse 2 Jean Jaurès
Période d’exécution: du 01-04-2024 au 31-12-2025)
Organismos partenaires: MoDe(s) : Decentralised Modernities : Art, politics and counterculture in the transatlantic axis during the Cold War, FRAMESPA: France Amérique Espagne – Sociétés Puovoirs Acteurs.

Porteuses du projet: Paula Barreiro López (Université Toulouse 2-Jean Jaurés) et Sonia Kerfa (Université Grenoble Alpes)

Équipe: Noa Buffavand (FRAMESPA / Université Toulouse 2-Jean Jaurés), Valeria Caballero Aguilar (Universidad Complutense de Madrid / Universidad Autónoma de Madrid), Cristina García Martínez (ICEA4 / Université Grenoble Alpes), Emmanuelle La France (FRAMESPA / Université Toulouse 2-Jean Jaurés), Tobias Locker (Saint Louis University), María López Ruído (Universidad de Barcelona), Fabiola Martínez Rodríguez (Saint Louis University), Jeanne Mosnier (LERASS/UT2J),Anita Orzes (Universidad de Barcelona / Université Grenoble Alpes), Julia Ramírez Blanco (Universidad Complutense de Madrid)

Comité scientifique et consultatif: Brigitte Aubry (FRAMESPA/UT2J), Anne-Laure Amilhat Szary (PACTE/UGA), Marco Baravalle (IUAV), Lîlâ Bisiaux (LLA CREATIS/UT2J), Thérese Coureau (CEIIBA/UT2J), Amilien  Estelle (ICEA4/UGA), Frank Gaudichaud  (FRAMESPA/UT2J), Marion Gautreau (FRAMESPA/UT2J), Cristina Híjar (INBA), Julie Martin (LLA CREATIS/UT2J),Pablo Mora Calderon (Universidad de Javeriana), Patricia Oliart (Newcastle University), Laura Pérez (University of California), Amanda Rueda (LERASS/UT2J), Brigitte Sebbah (LERASS/UT2J), Raquel Schefer Université Paris 3), Michèle Soriano (ICEA4/UT2J)